Visite d'une femme solitaire

Les Loups présents avaient fini de manger il y a peu et rigolaient encore de leur discussion. Les repas étaient toujours une petite fête ici, la nourriture servie en quantité mais aussi en qualité par Marc. Luun était parti avec lui dans la cuisine pour l'aider à préparer le dessert. La bonne humeur reignait en ce moment dans l'antre. Les plus jeunes étaient sur le point de réaliser une grande excursion au fond des mines, Rohel effectuait un travail dans le Nord de l'île entre deux sessions de travail au bureau des autorisations et Luun courait lui aussi entre un bureau, celui du tribunal, et des affaires personnelles. Tous étaient contents de se retrouver ici pour se détendre et prendre des nouvelles. Ce soir, c'était crêpes avec fruits en morceaux, et cidre brut pour accompagner.

Revenant de la cuisine avec deux bouteilles ouvertes et un bon nombre de bolées sur un plateau, Luun remarqua l'arrivée d'une nouvelle venue. Les ombres la cachait mais son odeur la trahit. Un sourire grandit sur le visage du Loup. Ainsi elle était venue. Sympathique. Le Loup se dirigea vers elle une fois son plateau posé à la grande table où la meute siégeait.

Bonsoir Corinne, comment allez-vous? C'est un plaisir de vous recevoir parmi nous aussi vite après mon invitation. Avez-vous mangé? Nous allions prendre le dessert rejoignez-nous donc!

Le Loup avait salué la Française d'un baise main travaillé, rempli de douceur mais pas assez insistant pour être déplacé ou montrer quelque intérêt particulier pour la demoiselle. Il lui présentait du bras la grand table qui tenait la majeure partie de la pièce centrale et où les autres étaient assis.

Je suis content de vous savoir en bonne forme, et rassasiée de sang. Je crains que, à moins de vous servir à mon cou et avec vos propres crocs, nous n'en servions goutte ici.

Le Loup sourit à leur invité, dévoilant des canines pointues au milieu de ses dents blanches et bien alignées. Il amena Corinne à une chaise libre et l'aida à s'asseoir.

Voulez-vous du jambon avec vos crêpes? N'ayant point mangé nous pourrions vous en faire quelques unes salées avant de passer aux sucrées.

Corinne lâcha un petit rire taquin.

- Quel charmeur vous faites ! Cela dit, boire du sang, anglais qui plus est, n'est pas dans mes habitudes, je préfère le voir couler pour ma part.

Corinne s'installa à la chaise que Luun lui proposa avec galanterie.

- Du jambon ? Pourquoi pas. Il serait malvenue de ma part de refuser la pitance offerte par un hôte aussi accueillant.

Le Loup rendit son sourire à Corinne, ne prenant pas mal le fait d'être traité de charmeur, au contraire. Après l'avoir installée et avoir entendue sa réponse il retourna aux cuisines. En plus des pots de confiture et de la motte de beurre qui emplissaient déjà un plateau, il rajouta cinq tranches de jambon. Avec des gestes agiles des mains Marc et lui conversèrent silencieusement quelques instants puis il revint dans la pièce.

Les crêpes vont bientôt arriver, une première fournée en tout cas. En attendant voici le cidre.

Luun servit chacun présent à table d'une grande bolée et laissa Corinne et les autres discuter.

Melin observait discrètement la nouvelle venu prendre place et affichait un léger sourire moqueur en voyant Luun faire autant de manière . N'aimant pas le sucré, il commença a fumer avec sa toute nouvelle pipe, en buvant quelques lampées de cidre . Il laissa quelques temps avant de prendre la parole et s'adresser a Corinne .

Corinne, c'est bien ça ?

Vous venez vous présenter pour la place de femme de ménage, c'est ça ?

Comme vous pouvez le constater, il est urgent pour nous de recruter !

Melin regarde la jeune femme avec un sourire moqueur tout en s'apprêtant a recevoir les foudres de la tablée .

Une main velue se posa sur l'épaule de Melin ...

"Va pas donc effaroucher la demoiselle qui honore notre table ce soir ! Après tu viendra encore te plaindre que tu passe tes soirées tout seul !"

Salty dog se tourna vers La visiteuse

"Veuillez l'excuser Mademoiselle, la guilde n'a pas encore les moyens de payer des cours de maintien à tous ses jeunes chiots. Je sors moi même de cours de dressage il y a peu ... Mais mangez donc, vous êtes maigre à faire peur et un peu de jambon de pays aura tôt fait de vous donner bonne figure !"

Salty dog se rassit se réfrénant de faire trois fois le tour de sa chaise avant de poser son séant sur la banquette.

Toute joyeuse j’entrais dans la taverne, d’un regard circulaire je vis mes loups
Bonjours
C’est bien de vous ça
Dés qu’une jolie femme est là, vous étés pire qu’un essaim d’abeilles
Agglutiner
Au passage je fis un clin d’œil a marc, pris une bouteille de champagne, des verres
Merci, c’est pour notre invitée
Je fis une révérence « alex la louve »
Nous nous sommes déjà rencontrés, j’ai apprécié vos soins
Je déposais les verres, servis le champagne
Tenez pour accompagner votre repas
Rieuse je la regardais

Lorsque Luun la laissa seule, un court silence s'installa. Corinne en profita pour se désaltérer en goûtant au cidre. Puis, l'un des Loups s'adressa à elle avec une supériorité non feinte, rabaissant Corinne à une simple femme de ménage. L'un de ses compagnons, un certain Salty Dog commença par faire preuve de plus d'amabilité en excusant son compère pour ses manières, pour finalement lui suggérer de prendre du poids. A croire que les Loups ne sont pas tous comme Luun. Enfin, une femme qu'elle avait déjà rencontrée fit son entrée et la salua. A peine Corinne avait-elle finit son verre de cidre avant d'avoir pu ouvrir la bouche, que déjà Alex lui servait un verre de champagne.
Corinne sourit à Alex en retour.

- Merci très chère. Ne vous en faites pas pour moi, ce ne sont pas quelques remarques typiquement masculines qui vont me déstabiliser. Puis se tournant vers Salty Dog. Nul besoin de l'excuser, je comprend tout à fait de la part d'un "jeune chiot" pour vous citer qu'il ait besoin d'aide pour se nettoyer le séant après avoir déféqué. A son âge, on ne sait pas encore bien s'y prendre et on s'en met partout. Je note également un léger relent d'urine et de poils mouillés, à croire qu'il ne sache pas non plus se servir de sa masculinité, ajouta-t-elle taquine avec un clin d'oeil. Je lui suggèrerais donc de s'occuper avant toute chose de sa propre toilette. Et concernant mon hypothétique maigreur, je suis navrée de ne point correspondre à vos critères physiques. Cela dit, si les femmes bien en chair vous plaisent, il me semble que vous pourriez trouver votre bonheur à la maison close de Port-Louis, finit-elle en riant.

Luun ne put s'empêcher d'avoir un sourire jusqu'aux oreilles quand Corinne répondit aux autres. Assurément cette femme avait des crocs et n'hésitait pas à s'en servir. Décidément cette charmante demoiselle était une invitée de choix. Il donna une grande claque dans le dos de Melin et reprit:

Et ben alors, elle t'a coupé la chique? Mon pauvre, allez mange au lieu de bailler aux corneilles! Servez vous Corinne, faîtes comme chez vous n'attendez pas pour vous servir à votre convenance.

Le Loup alla ensuite s'asseoir en bout de table et prit lui-même sa part, lorgnant sans vergogne aucune sur Corinne.

Alors Corinne, que devenez vous donc? A part avoir pris le sang de quelques anglois que faites vous?

"Hum, Pardon vous dites ? J'ai peur de comprendre ... un salon de massage à vertu thérapeutique .. ma foi ça vaut peutêtre mieux que ces rebouteux qui vous volent et prétendent vous soigner avec l'imposition des mains ... Je vais me soigner de ce pas !! ! Bon appétit Mademoiselle !"

Note l'adresse en caractères gras dans son carnet ...

Luun invita Corinne à se servir. Ne le faisant point attendre, elle prit une crêpe et une tranche de jambon. Tout en dégustant son assiette, elle répondit à Luun entre deux bouchées :

- J'ai pour projet de m'aventurer dans une grotte au nord-est de l'île. Un contact m'a indiqué qu'il s'y trouverait quelques apparitions fort peu aimables à renvoyer dans l'autre monde. De plus, cette source m'a également demandé de rassembler divers matériaux afin de forger des objets assez rares d'une excellente facture, et qu'il m'en ferait profiter. Et puis qui sait, peut-être que mes talents pourraient être profitables aux promeneurs du coin qui se trouveraient en fâcheuse posture face aux revenants. Quoi que, pour les anglais, le côté profitable est quelque peu exagéré.

Luun mangeait lui aussi, mais une crêpe sucrée, et surtout dégustait le cidre avec entrain. Il sourit aux derniers propos de Corinne.

Ma foi, ne dit on pas que c'est aider son prochain que de l'aider à finir rapidement sa vie sans souffrir? Surtout un blessé ou un malade? Partant du fait que la nation anglaise entière est (ou peu s'en faut) atteinte de folie, c'est de notre devoir de les bouter n'est il pas?

Corinne sourit.

- Sur ce point, je ne peux que vous approuver. Mon expérience au contact des anglais, aussi restreint que possible, m'a appris qu'ils sont, sauf cas particuliers, peu dignes de confiance. Et puis, comparé au devoir, le plaisir de les achever après qu'ils aient eu l'audace de mettre leurs mains sales dans mes poches est bien plus gratifiant. Et vous Luun, dites moi, à part faire régner la justice dans notre belle colonie de Port Louis, que faites vous donc pour égayer vos journées ? Puis, prenant un air de confidence. D'ailleurs, à ce propos, j'ai eu vent d'une rumeur concernant une possible prise de notre avant-poste. Comme toute rumeur, je ne peux évidemment point confirmer la véracité de cette dernière, d'autant plus que vous risquez de me prendre pour une folle. A vrai dire, je ne sais si j'ai rêvé ou bien halluciné. Quoi qu'il en soit, une sorte d'apparition est venue me rendre visite il y a quelques nuits et dans son flot de paroles décousues, en plus de ce que j'ai compris comme une prise de notre avant-poste par des anglais, l'évocation de l'astre lunaire est revenue à plusieurs reprises. Je ne sais pas si vous y comprenez quelque chose. Personnellement, mes affaires me prenant tout mon temps et m'emmenant bien loin du lieu en question, je n'ai pas poussé plus profondément mes recherches.

Le Loup finissait une bouchée et s'apprêtait à répondre à la question de Corinne quand elle parla de vision. Haussant un sourcil il écouta avec attention ses dires. Une prise de tour? Cela semblait confirmé ou presque... La lune? Voilà par contre un fait intéressant.

Vous prendre pour folle? Mais allons donc, pourquoi ferais-je cela? Ne vous en faîtes pas, ici vous pouvez vous ouvrir de ces choses sans crainte. Ne serait-ce que pour moi, ces visions ont un intérêt, une valeur, et en rien ne sont hérésie ou folie. Il semble que les Anglais prévoient de piller notre ville, mais il se pourrait que leur objectif soit double. Quant à la lune... se pourrait-il que cela soit une façon de nous prévenir de la date de leur acte? Il faudrait vérifier avec Rohel.


Le Loup sourit à nouveau en regardant Corinne, reprenant une gorgée de cidre et tentant d'effacer la tension apparut lors des derniers instants.

Vous me demandiez ce que je fais en dehors de tenir le tribunal français. Ma foi, la réponse n'est pas aisée à donner. Disons que je suis là où me portent mes pas. A la recherche d'informations la plupart du temps. Mais mes capacités à la course ont baissé à force de rester sur les avant-gardes lors des combats, il faudrait que je m'y remette. Malgré tout, cela me permet aussi d'accéder à certains endroits... pour le moins dangereux. Et d'y suivre l'évolution des choses, des gens. Tout en me fondant dans le décors.

Luun regarda profondément Corinne, sondant ses yeux un long moment. Il appréciait sa présence et était désormais en outre intrigué par ses visions, s'il n'y en avait pas eu qu'une, ce qu'il croyait.

Apparemment, Luun semblait l'avoir prise au sérieux, des faits actuels concordant avec ce qu'elle venait de lui dire. Non pas que cela aurait dérangé Corinne, ce n'est pas elle qui en pâtirait. Quoi qu'il en soit, Luun avait l'air d'y voir un peu plus clair, et en repensant à cette visite nocturne, un détail lui revint en mémoire.

- Une date ? Je ne crois pas. Du moins ce dont je me souviens ne permet pas d'avoir de certitudes sur cette hypothèse. D'autant plus que cela laisse beaucoup d'options possibles. Cela dit, en y repensant, je revisualise un peu plus clairement la scène, et j'ai la certitude que mon visiteur l'a mentionné en tout et pour tout 4 fois. Peut-être cela peut-il vous aider. N'étant qu'une humble française isolée, je crains d'avoir encore quelques lacunes sur pas mal de sujets concernant les rouages de Liberty Island.

Puis sur un air taquin.

Vos capacités à la course diminuées ? Je n'en doute pas, ne serait-ce point un petit embonpoint que j'aperçois ?! Pas facile de se cacher dans l'ombre quand on a le ventre qui dépasse, finit-elle en riant.

Le Loup prit un air choqué suite à la pique de Corinne avant de partir d'un léger rire.

Non assurément c'est surtout que je travaille désormais avec un équipement bien plus lourd et versé dans la guerre, j'ai du remiser mes affaires de coureur des bois. Cela reviendra peut être.

Et puis, avant de penser à mon ventre, vous devriez penser à vos cuisses! Combien de crêpes avez vous déjà englouties? demanda-t-il en souriant. Lui-même en était à sa troisième. Marc était un bon cuisinier, simple mais doué.

Corinne prit un air faussement vexé.

- Mes cuisses se portent très bien, je vous remercie. Et si vous ne passiez pas votre temps à me dévisager, peut-être auriez-vous remarqué que je viens seulement de terminer ma première crêpe ! Concernant l'autre sujet, je me souviens de quelques autres paroles à présent : "à la naissance de la dernière des filles de Zeus et Thémis durant Jovis Dies".

Perplexe au souvenir de ces mots mystérieux, Corinne se servit d'une autre crêpe et y ajouta un peu de sucre et de citron avant de commencer à la manger.

Luun tira la langue à Corinne, presque coquinement, avant de reprendre un air sérieux cependant qu'elle se souvenait de choses de plus de sa vision.

Humm... Jovis dies, le jour de Jupiter, Jeudi.
Pour ce qui est de la dernière fille de Zeus.. et Thémis?...mm c'est controversé cela non? Ce sont les filles du destin je crois. Je ne me rappelle plus bien mais si mes souvenirs sont bons l'une tisse le fil du destin, la deuxième l'enroule, et la dernière le coupe, apportant la fin à une vie. Ensemble elles sont celles qui apportent les biens et les maux sur les Hommes, régissant leur vie. Par extrapolation on pourrait dire qu'elles sont nos mères comme nos bourreaux.

La dernière des filles par logique serait celle qui coupe le fil du destin, apportant la mort. Dans un cycle éternel tel que le jour, la fin serait le début de la nuit? Cette vision se rapporterait donc à un fait se déroulant un Jeudi, à la tombée de la nuit?

En résumé, Jeudi, il y aurait une attaque de notre tour à la tombée de la nuit? Enfin, si je décrypte correctement votre vision du moins...

Le Loup regardait Corinne, sans la dévisager, juste intrigué et intéressé aussi. Profondément.

Luun venait de montrer à Corinne une facette de sa personne fort intéressante. L'homme semblait cultivé et faisait preuve d'une logique développée. Son décryptage rapide malgré la légèreté de la conversation montrait qu'il possédait un esprit vif. Corinne ne put qu'acquiescer à la conclusion de Luun. Cependant, un détail la chiffonnait et ne concordait pas. Un des cours de mythologie de son mentor lui revint en mémoire.

- Je suis impressionnée par votre culture, mon cher Luun. Votre analyse me semble bonne, néanmoins je diverge sur un point. En effet, les soeurs du Destin, ou Parques, semblent les filles de Zeus et Thémis. Cependant, leur parenté est soumise à controverse. Cela dit, et je pense que l'avertissement, malgré le mystère qui l'entoure, doit être plus clair que cela, les Parques ne sont pas les seules filles de Zeus et Thémis. Il y a également les Horae, en grec, que l'on pourrait traduire par Heures. En conclusion, cette phrase signifierait "au début de la dernière heure de Jeudi", soit aux environs de 23h. Et si je ne m'abuse, ceci ne laisse qu'un peu plus de 24h pour organiser une défense. Ceci n'est qu'une interprétation découlant de la vôtre. Je n'oserais point affirmer là une vérité absolue. Bien sûr, nos deux versions ne semblent, au final, pas si différentes.

Corinne, tout en continuant de déguster sa crêpe sucrée, rendit en silence le regard que lui jetait Luun. Cette conversation était si passionnante que Corinne en avait fait abstraction des autres convives. Elle n'avait pas souvenir de les avoir entendus parler depuis un bon moment.

Le Loup soupira, presque théâtralement et sourit à nouveau en répondant à son invité décidément pleine de surprises.


Je n'ai pas eu la chance d'avoir à disposition beaucoup de livres, j'ai juste entendu dire que les liens familiaux étaient parfois difficiles à établir efficacement. De fait, je ne connais qu'une parcelle de cette mythologie, et j'ai du en oublier un peu, ce qui réduit encore mes connaissances. En tout cas vous semblez avoir une clef parfaite, tandis que je n'avais que réussit à dénicher la serrure. Vous êtes époustouflante.

D'un coup ses traits furent plus durs, intransigeants, presque froid. Sans le regarder il s'adressa à Skuleth.

Sku, tu étais avec Rohel je crois dernièrement en défense? Tu devrais monter le voir et le prévenir de ce que Corinne nous a rapporté. Il sera certainement intéressé.

Son regard qui avait un temps flotté dans le vide se fixa à nouveau sur Corinne, de nouveau un fin sourire aux lèvres, engageant.

Ma dame, je le pensais déjà mais j'en suis désormais encore plus certain, ceux qui s'arrêtent à regarder ce qui dépasse de vos habits ou y est suggéré, sont en plus d'être de profonds idiots, à un pas de la mort!

Regarde d'un air perplexe Luun et Corine en se demandant quel drogue ils avaient bien pu consommer .